Pourquoi les entreprises échouent à définir leur culture ?
Quand je demande à des recruteurs et des recruteuses de me décrire la culture de leur entreprise, j’ai quasiment toujours le même réflexe. À savoir un trio ou quatuor de valeurs en un seul mot.
Quelque chose comme : bienveillance, innovation et esprit d’équipe.
On peut d’ores et déjà s’interroger sur le problème de résumer la culture aux valeurs. Mais admettons. Ce qui est frappant c’est qu’on me les donne rarement d’une traite. Je vois plutôt la salle accoucher douloureusement :
- Ah oui attends… on a des valeurs sur le site
- Oulah mais moi je connais pas par coeur
- Je crois que y’a “bienveillance” dans le lot
- C’est bon ! J’ai trouvé, c’est sur le site : bienveillance, innovation et esprit d’équipe
Pourquoi ce n’est pas efficace ?
Si on oublie le fait que ce sont souvent des valeurs décidées d’en haut et qu’elles manquent d’appropriation sur le terrain, demeurent plusieurs problèmes à décrire les valeurs en un seul mot. J’en vois principalement trois.
Problème #1 : c’est trop flou
Le premier souci tient au fait que c’est beaucoup trop vague. Par conséquent, pour le même mot, on va avoir des interprétations différentes. Par exemple, je ne sais plus combien de personnes m’ont dit que dans leur culture il fallait des gens qui ont du leadership.
Certes, mais c’est quoi le leadership ? C’est là que ça se complique : on me donne autant de définitions différentes que de personnes.
Chaque personne va interpréter selon sa sensibilité. D’autant que les valeurs sont souvent des mots vagues. On a rarement des valeurs affichées comme “féminisme” ou “radicalité”. Quelque chose qui aurait au moins le mérite d’être fort et d’avoir une connotation affirmée. Non, les valeurs sont toujours des mots les plus déchargés en sens possibles. On dira plutôt “diversité”.
Donc, non seulement, on se limite à un mot mais en plus on choisit des mots de langue de bois. Les plus creux possibles.
C’est un paradoxe : la culture est censée être ce qui nous différencie des autres. Alors pourquoi l’exprimer avec des mots creux ?
Problème #2 : on ne prend pas la peine de prouver
C’est bien beau de dire qu’on a une culture de la bienveillance. Mais concrètement ça se répercute comment ? Comment on fait pour s’assurer qu’il s’agit bien d’une valeur opérante et non pas seulement d’une valeur déclarée ?
Si je donne juste le mot sans l’appuyer par un chiffre, une statistique, des anecdotes, des rites, des méthodes de travail, des récompenses, des sanctions… je parle dans le vide.
J’adore dire que je devrais faire du sport. Si on me demandait de faire mes valeurs de vie je dirais qu’il faut faire du sport.
Pourtant…
… je n’en fais pas !
Il faut réussir à développer une lucidité collective sur ce qu’on est. À l’échelle de l’individu, Hegel disait que l’être humain n’est que la série de ses actes. Et bien c’est pareil à l’échelle collective : la culture de l’entreprise n’est que la série de ses actes.
Je peux dire et même croire que je suis une personne bienveillante. Mais si tous mes actes le contredisent…
Je peux dire et même croire que je suis une entreprise qui favorise la diversité. Mais si je n’ai aucun acte pour l’appuyer ? Aucune récompense de comportements qui vont dans le bon sens, aucune sanction pour les comportements qui vont à l’encontre…
Problème #3 : les valeurs sont les mêmes mots partout
C’est probablement le plus désastreux. Non seulement on choisit des mots vagues sans les appuyer par une preuve mais en plus on choisit les mêmes mots que tout le monde. Quand on regarde les sites des entreprises du CAC 40 ce sont les mêmes valeurs qui reviennent en permanence : respect, esprit d’équipe, innovation, bienveillance…
Là encore… comment se fait-il qu’on dise la même chose alors que la culture est censée être ce qui nous différencie des autres ?
Solution #1 : préciser le mot avec des phrases
Pour éviter cet écueil je propose toujours en formation de faire l’effort de décrire les valeurs en phrases. De ne surtout pas se limiter à un mot. Et ça devient tout de suite beaucoup plus intéressant.
Plutôt que de dire leadership, on va développer ce que ça veut dire pour nous. Comment ça se répercute, comment ça se déploie et aussi les problématiques que ça soulève.
Car il n’existe pas de valeurs sans problématique. Une valeur a des avantages et des inconvénients. Il faut donc essayer de bien développer les inconvénients quand on décrit la valeur.
Voici un exemple tiré du document qui décrit les valeurs de LEDR et que j’ai moi-même écrit :
TU ES TOTALEMENT LIBRE DONC RESPONSABLE
Qui que tu sois, tu as une mission. Que ce soit dans ton lit ou au bureau, tu pourras travailler comme tu veux, où tu veux, à l’heure que tu veux, dans la tenue que tu veux.Avec la confiance, vient donc la liberté. C’est le résultat qui compte. Or, depuis Spider-man, tout le monde sait qu’avec un grand pouvoir vient de grandes responsabilités. Ta responsabilité est à la mesure de ta liberté : totale. Interdiction de rejeter la faute sur les autres : tu es libre et responsable.
Je ne me suis pas contenté de dire “Valeur : liberté”. Je détaille ce que j’entends par là. C’est important car ça délimite le périmètre. On voit que la liberté ici c’est surtout dans la manière de travailler.
Mais surtout, je donne immédiatement la limite : si tu es libre, tu es responsable. Tu ne pourras pas te défausser sur quelqu’un d’autre quand quelque chose ne marchera pas.
D’autre part, j’ai écrit ce texte au tout début quand on était encore que 4. Maintenant qu’on est 15 et que j’ai plus de recul, je rentre encore plus dans les détails pendant mon entretien culturel avec les candidat·es qui postulent chez nous.
Je leur explique notamment que cette culture de la liberté a un effet secondaire que je n’avais pas anticipé : c’est une culture qui favorise la solitude. En effet, si tout le monde peut venir au bureau quand il veut, c’est dur de trouver quelqu’un au bureau au même moment que soi.
Autre effet secondaire : les personnes qui ont besoin de beaucoup de cadre se noient très vite chez nous.
Solution #2 : apporter les preuves qui étayent et concrétisent la valeur
Une fois qu’on a compris comment développer la valeur en phrases plutôt qu’en un mot il faut se poser la question de sa réalité. Est-ce que ce je viens de décrire est réel ?
Est-ce ce qu’il se passe vraiment ou ce que j’aurais aimé qu’il se passe ?
Encore une fois suis-je dans une valeur déclarée ou une valeur opérante ?
Pour le savoir il faut prendre un peu de recul, avoir de la lucidité collective. On peut également se servir des avis que l’on trouve sur des sites comme Glassdoor qui vont faire des retours qui valent ce qu’ils valent mais qui ont le mérite d’exister et d’alerter.
Il va falloir mener l’enquête : est-ce que la valeur se répercute ? Comment ? On peut aller regarder du côté des récompenses et des sanctions mais également du côté des manifestations “physiques” et rituels.
Par exemple, si je reprends la valeur précédente de la liberté, elle se concrétise chez nous de plein de manières différentes. Mais celle qui est la plus marquante est la politique des congés illimités sans validation requise.
Cette preuve est importante car elle interpelle et pousse les candidat·es à poser des questions. Pareil pour les personnes qui viennent de nous rejoindre, pendant leur intégration.
Une bonne preuve se manifeste dans le quotidien des personnes qui travaillent dans l’entreprise. Ce n’est pas quelque chose d’abstrait. Une bonne preuve soulève des questions et est l’occasion de débattre et transmettre.
Prenons un autre exemple toujours tiré du document de nos valeurs :
DIS LES CHOSES
Exprime-toi… avec ou sans bienveillance, avec ou sans tact, avec ou sans émotion. L’important c’est de se dire les choses, sans barrière. Tu as peur ? Tu es en colère ? Dis-le. En individuel, ou à plusieurs. Mais dis-le. On ne t’en voudra jamais de dire. Par contre on t’en voudra de ne pas dire. Rien n’est évident, rien ne va de soi… les autres ne sont pas des autres toi.
Attention, si tu dois dire les choses ça veut dire qu’il faut également pouvoir entendre les choses que disent les autres. Attention, si tu dois dire les choses ça veut dire qu’il faut accepter la vulnérabilité qui va avec. Attention, si tu dois dire les choses ça veut dire qu’il faut les assumer.
Enfin, viendra le moment où tu douteras. Tu te diras « j’aurais mieux fait de ne rien dire ». Tu auras tort : il vaut mieux dire que ne pas dire, dans tous les cas. Tu ne vas pas le croire en le lisant mais je t’avertis : la plupart des gens croient qu’ils ont trop communiqué alors qu’ils n’ont pas assez communiqué.
Là encore, on a une valeur qui est décrite plus longuement qu’un mot. Je ne me contente pas d’écrire Valeur : franchise. J’explique ce que j’entends par là. Et je prends le temps de rendre un arbitrage. La notion d’arbitrage est très importante car la culture c’est justement ce qui permet de faire des choix dans les moments difficiles mais aussi dans la vie normale de l’entreprise.
Bien entendu que tout le monde préfère un endroit où on dit les choses avec douceur plutôt qu’un endroit où tout le monde se tait. Mais quand y’a dilemme on fait quoi ? Quand il faut arbitrer entre un endroit où on dit les choses même brutalement, même sans mettre les forme ou un endroit où on préfère ne pas dire quelque chose si ça peut blesser, que choisit-on ?
Il n’y a pas de choix supérieur à un autre. Mais il faut faire un choix.
C’est un peu comme les gens qui vous disent qu’ils veulent faire un travail passionnant et bien payé. Sans blague. Mais la vraie question c’est quand le dilemme arrivera, que choisir ? Certaines personnes favoriseront un job passionnant même si c’est moins bien payé, d’autres favoriseront l’inverse.
Le mieux c’est de ne jamais avoir le dilemme, certes. Mais c’est l’arbitrage qui va définir le caractère.
Mais revenons à la notion de concrétisation de la valeur. Comment se concrétise la valeur dis-les choses chez nous ?
Et bien déjà au quotidien, les gens parlent ouvertement dans la messagerie interne (Slack). Mais surtout dans nos réunions mensuelles d’équipe, chaque fois qu’on accueille une nouvelle recrue c’est toujours le même feedback : wow je viens déjà d’arriver qu’on parle des comptes de la boîte, de ce qui va pas, avec tout le monde qui donne son avis etc.
Pourtant… on échouait à déployer correctement cette valeur sur un point : jusqu’en 2020 les salaires étaient confidentiels. On a changé ça fin 2020 : on a voté pour une transparence totale des salaires.
Bah oui… comment on peut dire dis-les choses mais pas les salaires ? Qu’est-ce qu’on cache ? L’inconfort de certaines injustices liées au fait que certaines personnes gagnent un peu plus car elles ont mieux négocié à l’entrée ? Bon bah abolissons dans la foulée le concept de négociation individuelle : désormais on communiquera les salaires des entrants dès le début. Et, au passage, faisons des revalorisations salariales auprès des gens pour lesquels on se rend compte qu’ils sont sont payés car ils ne sont pas doués en négociations.
On n’est pas parfaits et on travaille encore dessus. En deux ans d’application on a échoué à plusieurs reprises à être transparents sur les nouveaux entrants, par habitude. Mais on en a reparlé à la dernière réunion et on va continuer à s’imposer cette rigueur.
Solution #3 : se sortir du piège de l’universel
Si tu as déjà été sur un site de rencontres alors tu as remarqué que la plupart des profils sont identiques. Tu as des gens qui aiment : voyager, rigoler, voir leurs amis et boire des verres en terrasse.
Super. Et moi j‘aime avoir du plaisir et j’aime moins avoir des douleurs.
Mais pourquoi on en arrive là ? Parce qu’on a peur de se positionner.
Pourquoi on a peur de se positionner ? Parce qu’on a peur du rejet. Pourquoi on a peur du rejet ? Non je rigole… a priori c’est évident ou alors ça va nous emmener en psychothérapie.
Le problème c’est que ça ne marche pas comme on croit. En étant vague on n’attire pas plus de gens, on attire moins de gens. C’est valable dans le monde des rencards : si on fait un rendez-vous avec une personne qui ne se positionne pas, c’est vite chiant. C’est valable dans le monde du recrutement : si l’entreprise a les mêmes valeurs vides que tout le monde c’est rébarbatif.
Ce qui attire est précis. Ce qui est précis attire.
Mais… il est également vrai que ce qui est précis repousse.
Sauf que… justement, le but est de repousser les personnes qui ne correspondent pas à ma culture. On ne veut surtout pas être la figure Jean-Jacques Goldman. Je dis bien la figure, il ne s’agit pas de juger la personne (que je ne connais pas), ni l’artiste.
Par figure Jean-Jacques Goldman j’entends ce truc de la personnalité préférée des français.
Pourquoi Goldman est encore, au moment où j’écris, la personnalité préférée des français (et ce depuis des années) alors qu’on ne le voit plus ? Bah justement. C’est parce qu’il ne s’exprime pas qu’il est la personnalité préférée des français.
Mais combien de gens sont vraiment fans de Goldman ? Je veux dire fans à se ruer en concert ? Beaucoup. Mais probablement pas plus que d’autres artistes qui sont détestés mais aussi adorés.
C’est ce qu’on oublie : les gens qui déclenchent vraiment une adhésion forte sont aussi les gens qui déclenchent un rejet fort. Ça marche de concert. Jeu de mot involontaire.
Alors que les gens qui font “l’unanimité”, le font toujours mollement.
Une bonne culture doit donc nous différencier des autres. Or, qui dit se différencier implique un clivage. Une bonne culture c’est une culture qui fait des choix que tout le monde ne fait pas. Une bonne valeur trace une ligne dans le sable avec des gens des deux côtés.
Une bonne valeur sort du fantasme de la valeur universelle. D’autant plus que valeur universelle implique également valeur supérieure. Bah oui, s’il existe des valeurs qui font l’unanimité alors ces valeurs sont supérieures. C’est d’ailleurs pour ça que les entreprises aiment tant mettre “respect”, “intégrité” dans leurs valeurs. Parce que ce sont des comportements supérieurs.
Bien sûr que personne ne va se réclamer de la malhonnêteté.
Mais du coup… ce n’est pas une valeur. Il n’y a pas de culture supérieure à une autre. Un comportement supérieur n’est pas une valeur, c’est plutôt un idéal.
Prenons encore un exemple tiré du document de nos valeurs :
LA DÉMOCRATIE NE FONCTIONNE PAS EN INTERNE
On débat beaucoup car on a une passion française pour l’abstraction et la logique. Mais ne t’y trompe pas : à la fin les décisions ne sont jamais démocratiques. La dictature est le seul régime qui fonctionne dans une équipe de sport. Les joueurs de foot ne délibèrent pas de leur stratégie.
Souvent le débat est la preuve que personne ne veut prendre un sujet en main ou alors qu’on a pas assez travaillé. Et c’est pour ça que les volontés ne s’alignent plus. Mais à un moment quelqu’un se lève et dit « suivez-moi, on va aller là » ou alors le fait dans son coin tout seul puis le présente aux autres qui s’y rallient. Il faut toujours un dictateur éclairé pour avancer. Ceci est évidemment une règle interne, ne fais pas ça chez toi.
Je suis toujours étonné de voir le peu d’entreprises qui décrivent leur régime de décisions. La plupart des entreprises sont des dictatures, pas des démocraties. Mais elles ne le réalisent même pas. Attention, j’utilise ici le terme dictateur au sens qu’il avait par exemple dans la République romaine antique. À ne pas confondre donc avec le terme de tyran.
Ici on entend par dictature un régime où une seule personne est en charge de la décision.
Autre point qui n’est pas détaillé dans le document mais qui est détaillé dans l’intégration : aucune valeur ne peut exister seule. Elles vont toutes ensemble pour faire un cocktail. Parfois je vois des gens se focaliser sur une seule de nos valeurs et être dans l’incompréhension. Mais c’est normal, c’est comme si on prenait le gingembre d’un cocktail et qu’on le croquait directement. Ah bah c’est sûr que ça peut être infect.
Ici c’est important de se rappeler que cette valeur s’imbrique avec dis-les choses et tu es libre et responsable.
Par conséquent, une seule personne prend la décision MAIS toutes les autres peuvent (et vont) parler, et il va falloir affronter ce débat en permanence. C’est quelque chose qui est parfois mal compris. Je dis à une nouvelle recrue : sur ton sujet tu as les plein pouvoirs. Puis elle fait n’importe quoi… les gens lui disent tu fais n’importe quoi là et la personne s’exclame mais c’est moi qui décide.
Alors, oui, certes. Mais si tu fais n’importe quoi alors tout le monde te dira que tu fais n’importe quoi jusqu’à ce que tu leur prouves l’inverse, et tu pourras pas l’empêcher.
De même, puisque nous sommes libres et responsables la notion de dictature se divise par sujet. Par exemple, sur les sujets commerciaux collectifs, le responsable commercial sera dictateur. Sur les sujets événementiels collectifs la responsable événementiel sera dictatrice.
Mais à l’échelle individuelle je vais être mon propre dictateur ou ma propre dictatrice. Voilà pourquoi personne ne s’immiscera jamais dans ma décision de prendre des congés à telle date. C’est mes congés, c’est moi qui décide.
Cette politique garantit justement la liberté. Aucun commercial ne pourra m’obliger à faire quelque chose que je ne veux pas en formation. À l’inverse, en tant que formateur je ne décide pas des prix auxquels les formations sont vendues. Je peux donner mon avis mais ce n’est pas moi qui décide.
C’est une valeur qui est parfois compliquée à comprendre parce que les nouvelles recrues vont avoir tendance à attendre une validation. Par exemple, si je recrute une personne responsable marketing ce n’est pas pour lui dire quoi faire, c’est pour qu’elle me dise moi quoi faire en marketing. Du coup, si elle attend une validation elle risque d’attendre longtemps.
D’ailleurs, tu te rappelles quand je te disais que toutes nos valeurs sont un cocktails et qu’elles s’agencent ensemble ? Et bien voilà une autre valeur qu’on a :
IL VAUT MIEUX S’EXCUSER QUE DE DEMANDER LA PERMISSION
Puisque la vitesse est la chose la plus importante, tu vas finir par casser des oeufs en faisant les choses.Mais ce n’est pas grave. Il vaut mieux guérir que prévenir. Je sais qu’on t’a appris l’inverse mais c’est faux. Il vaut mieux guérir que prévenir quand les erreurs ne sont pas vitales.
Je le répète une dernière fois : il vaut mieux guérir que prévenir. C’est seulement quand on est sur des sujets vitaux ou irréversibles qu’il vaut mieux prévenir que guérir. Et nous n’avons pas ce genre de sujet. Fais les choses. Attention. Ça ne te protège pas contre les remontrances car dans « il vaut mieux s’excuser » il y a le mot s’excuser. Mais personne ne t’en voudra d’avoir essayé quelque chose.
Par contre on peut vraiment t’en vouloir de n’avoir rien fait parce que tu attendais une permission. Et quand je dis vraiment c’est vraiment, vraiment. C’est une perte de temps et de vitesse.
Là encore, ça s’imbrique avec tout le reste : personne ne va t’imposer quoi faire sur ton expertise.
Tu ne peux pas combler tous les besoins
J’insiste : une bonne culture fait débat. Si personne ne débat pas de ta culture c’est parce que tu as énoncé quelque chose qui n’est pas une culture.
Une manière pour explorer ce concept c’est de cartographier les besoins professionnels possibles. Il y a plein de modèles là-dessus, mais un des modèles que j’aime beaucoup c’est le modèle Freya de Jobteaser (ceci n’est pas un post sponsorisé, c’est juste que c’est eux qui l’ont travaillé), inspiré notamment des 19 valeurs de Schwartz.
Si tu as reçu les emails de Tania, tu sais de quoi je parle. Si ce n’est pas le cas… et bien déjà n’hésite pas à t’abonner à nos emails où on partage plein de contenu très régulièrement. Et ensuite… voici un résumé.
Ce modèle est constitué de 18 besoins professionnels qui se répartissent en 5 grandes catégories. Les voici :
Catégorie A : Dispositions - L'équilibre et le cadre de travail
- Indépendance : J’ai besoin d’être dans une organisation qui me laisse gérer mes priorités et mes tâches professionnelles tel que je le souhaite.
- Rythme de travail : J’ai besoin d’être dans une organisation qui me permet d’aménager mes horaires de travail tel que je le souhaite.
- Équilibre de vie professionnelle / personnelle : J’ai besoin d’être dans une organisation où ma vie professionnelle ne déborde pas sur ma vie personnelle.
- Rémunération : J’ai besoin d’être dans une organisation qui m’offre une rémunération importante pour le travail que j’effectue.
Catégorie B : Social - La coopération et la bienveillance
- Respect et honnêteté - J’ai besoin d’être dans une organisation qui promeut la confiance et la transparence entre ses employé·es
- Collaboration - J’ai besoin d’être principalement sur des tâches collaboratives
- Soutien professionnel - j’ai besoin d’être dans une organisation où je me sens soutenu·e, écouté·e et aiguillé·e en temps voulu
- Ambiance amicale et chaleureuse - J’ai besoin d’être dans une organisation qui entretient une ambiance conviviale au sein de ses locaux
Catégorie C : Missions - La stimulation et développement de soi
- Apprentissage : J’ai besoin d’être sur des projets où je peux apprendre et monter en compétences
- Aptitudes exploitées - J’ai besoin d’être sur des tâches où je peux exprimer ma créativité intellectuelle
- Défi - J’ai besoin d’être constamment stimulé·e dans mon univers professionnel
Catégorie D : Notoriété - La reconnaissance sociale et le statut
- Influence - J’ai besoin d’être à des positions de pouvoir dans mon environnement professionnel
- Progrès et technologie - J’ai besoin d’être dans une organisation qui favorise l’innovation et qui soit à la pointe des nouvelles technologies
- Renommée - J’ai besoin d’être dans une organisation prestigieuse et qui a une renommée nationale ou internationale
- Dynamisme - J’ai besoin d’être dans une organisation animée, qui propose diverses sources de divertissement à ses employé·es
Catégorie E : Sociétal - L'engagement social et environnemental
- Engagement social - J’ai besoin d’être dans une organisation dont l’objectif principal est d’aider les autres
- Engagement environnemental - J’ai besoin d’être dans une organisation soucieuse de l’environnement
- Justice sociale - J’ai besoin d’être dans une organisation qui promeut l’égalité des droits
Ce que tu peux faire dès à présent c’est réfléchir à ton propre top 3 ou top 5 de besoins professionnels. Qu’est-ce qui est le plus important pour toi ? Puis tu peux demander à des collègues de faire pareil et de voir si vous avez des recoupements.
Grâce à ces recoupements vous pourrez en déduire les éléments qui sont propres à la culture de votre entreprise. À l’inverse, vous pourrez également faire ressortir quels besoins ne sont volontairement pas couverts par votre culture.
Par exemple dans le cas de mon entreprise, nous somme une PME, donc nous ne cherchons pas à couvrir le besoin #14 : J’ai besoin d’être dans une organisation prestigieuse et qui a une renommée nationale ou internationale.
Alors qu’à l’inverse, comme on l’a vu plus haut, notre culture essaie de couvrir le besoin #2 : Rythme de travail : J’ai besoin d’être dans une organisation qui me permet d’aménager mes horaires de travail tel que je le souhaite.
En résumé
Il faut arrêter le jeu des valeurs en un mot. Parfois j’ai l’impression d’être dans un pyramide géant ! Est-ce que c’est un concours et personne m’a mis au courant ? Si c’est le cas merci de me prévenir s’il vous plaît, je me sens super seul. Est-ce que si je dis une valeur en deux mots je suis éliminé ? Si je définis la valeur, je perds des points ?
Quand tu analyses la culture de ton entreprise, essaie de faire des phrases pour limiter le plus possibles l’interprétation. De préférence en se débarrassant de la langue de bois pour avoir un propos précis.
Mais surtout il faut assumer qui on est en tant qu’organisation et ne pas se limiter à des grandes déclarations vagues. Bien sûr, je comprends pourquoi les services juridiques des multinationales mettent la pression pour que les valeurs soient vague sur le site. Mais nous ne sommes pas obligé·es de les reprendre en interne.
J’entends que ça soit ce qu’on montre à l’externe pour ne pas avoir de bad buzz avec la presse par exemple. Mais en interne il est important d’avoir conscience de ce que sont nos vraies valeurs.
Enfin, il faut réussir à prouver. Une valeur sans preuve, sans manifestation n’est pas une vraie valeur. Si ma valeur c’est l’égalité hommes-femmes et que je n’ai rien pour la mesurer, aucune sanction pour les gens qui s’y opposent… je n’ai pas une valeur, j’ai une déclaration politicienne.
Si ma valeur c’est l’esprit d’équipe mais que mes commerciaux sont rémunérés avec un variables individuels… je n’ai pas une valeur, j’ai une déclaration politicienne.
Si ma valeur c’est la transparence mais que les informations stratégiques sont cachées… je n’ai pas une valeur, j’ai une déclaration politicienne.
En tout cas, si tu veux te former à mettre en valeur ta culture dans tes annonces, tu peux le faire avec nous :)